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Discours de l’Ambassadeur LU Shaye au dîner-séminaire du Cercle Richelieu-Senghor
2024-11-06 20:36

Le 5 novembre 2024

Cher monsieur le sénateur Durain,

Cher monsieur Rousseau,

Cher monsieur le président Bogeat,

Mesdames, Messieurs,

Chers amis,

C’est un grand plaisir pour moi de participer, sur l’invitation du Cercle Richelieu-Senghor, à ce dîner-séminaire sur le thème « la Chine et la francophonie » et de prononcer un discours. En français, on dit souvent : « Mieux vaut ami en voie que denier en courroie ». On dit aussi en Chine « C’est facile d’obtenir des milliers de pièces d’or, mais difficile de se faire un ami de cœur ». Le Cercle Richelieu-Senghor a pour objectif de promouvoir la culture francophone, de favoriser le dialogue entre le monde francophone et d’autres pays, et de renforcer l’amitié entre différentes cultures. Je le remercie de m’offrir cette précieuse occasion de rencontre pour approfondir la compréhension mutuelle entre les langues et cultures chinoises et françaises. Je remercie également Monsieur le président Bogeat et tous les amis ici présents pour les efforts inlassables que vous avez déployés en faveur des échanges et de la coopération amicaux entre la Chine et le monde francophone.

J’ai une histoire intime avec la langue française. Né en 1964, l’année où la Chine et la France ont établi des relations diplomatiques au niveau d’ambassadeur, j’ai été choisi à l’école pour apprendre la langue française, et le premier film français que j’ai vu était une co-production sino-française « Cerf-volant du bout du monde ». Après l’université, recruté par le Ministère des affaires étrangères chinois, j’ai travaillé sur l’Afrique pendant plus de 20 ans jusqu’au poste du Directeur général d’Afrique, et parcouru presque tout le continent. Par la suite, j’ai été nommé ambassadeur de Chine au Canada, puis, il y a cinq ans, ambassadeur de Chine en France. Je fais de mon mieux pour promouvoir les relations sino-françaises à l’ère nouvelle, renforcer la coopération bilatérale dans divers domaines, présenter la Chine en langue française, et rapprocher la Chine du monde francophone, afin que davantage de francophones puissent mieux connaître, comprendre et aimer la Chine.

Cette année marque le 60e anniversaire des relations diplomatiques entre nos deux pays et l’Année sino-française du tourisme culturel. Nous sommes heureux de constater que les échanges humains et culturels sino-français et sino-européens affichent un élan de développement vigoureux.

Premièrement, les échanges de haut niveau jouent un rôle pilote. En mai dernier, le président Xi Jinping a effectué une visite d’État très réussie en France, lors de laquelle les couples présidentiels des deux pays se sont rendus spécialement dans les Hautes-Pyrénées pour mener un échange privé et approfondi, donnant l’orientation à suivre pour le développement des relations sino-françaises et l’approfondissement de la coopération dans les domaines socioculturels pour les 60 années à venir. Pendant les JO de Paris, le Vice-Président Han Zheng et la conseillère d’État Shen Yiqin sont successivement venus en France pour assister aux cérémonies d’ouverture et de clôture en tant que représentants spéciaux du président Xi Jinping, illustrant pleinement la grande importance que la Chine attache à ses relations avec la France de même que son soutien ferme à la France pour l’organisation des Jeux.

Deuxièmement, les échanges humains et culturels ont favorisé la compréhension mutuelle. Dans le cadre du 60e anniversaire des relations diplomatiques et de l’Année du tourisme culturel, les 16 projets marquants sur les échanges humains en France et en Chine 2024 ont tous été réalisés avec succès. Nos deux pays ont également organisé des centaines de spectacles, d’expositions, de conférences et de forums sous diverses formes. Les publics chinois et français ont pu profiter près de chez eux des programmes culturels et artistiques d’excellence de l’autre pays.

Troisièmement, les échanges du peuple ont rapproché la Chine et la France. Depuis que la Chine a mis en œuvre la politique d’exemption de visa de 15 jours en décembre dernier en faveur des Français, qui sont toujours plus nombreux à partir quand ils veulent à la découverte de la Chine. Rien que pour le premier semestre de cette année, plus de 100 000 voyageurs de nationalité française ont foulé le sol chinois, trois fois le nombre des voyageurs français en Chine au cours de la même période en 2023, et dont plus de la moitié ont profité de l’exemption de visa. Le succès des JO de Paris a également amené une nouvelle vague de touristes chinois en France. Selon les estimations de la partie française, le nombre de touristes chinois en France augmentera cette année d’environ 90 % par rapport à l’année dernière, et atteint progressivement le niveau d’avant la Covid.

Nos deux pays, aux valeurs et aux systèmes sociaux différents, ont toutefois le même « tempérament », comme l’a dit le président Macron lors de sa visite en Chine l’année dernière. Ce n’est donc pas une coïncidence que les échanges humains et culturels bilatéraux ont connu un développement accéléré dans le cadre du 60e anniversaire des relations diplomatiques et de l’Année du tourisme culturel.

À en juger pour l’histoire, la longue tradition d’échanges amicaux entre les deux pays est à l’origine de l’inspiration mutuelle des civilisations chinoise et française. Au fil des siècles, nos deux civilisations ont toujours rayonné grâce à l’intégration et à la confrontation. Lors de l’exposition « La Cité interdite et le château de Versailles » ouverte à partir d’avril dernier, les deux parties ont exposé conjointement plus de 200 œuvres, dont des laques et des porcelaines chinoises utilisées par la cour française, des émaillés et peintures occidentaux conservés à la cour de la dynastie des Qing. En 2019, le président Macron a remis au président chinois Xi Jinping, en visite en France, un original français de l’Introduction à la lecture de Confucius datant de 1688. En mai dernier, le président Xi Jinping lui a offert en retour un ensemble de traductions chinoises des chefs-d’œuvre français lors de la visite d’Etat en France. Cet échange de cadeaux illustre bien la vitalité des échanges intellectuels et culturels de longue date entre nos deux pays.

Aujourd’hui, l’inspiration mutuelle des civilisations chinoise et française s’accroît avec l’admiration de la langue et de la culture d’un peuple par l’autre. Ces dernières années, de plus en plus de jeunes chinois tournent leurs regards vers la France, la langue française est devenue une faculté très prisée dans les universités chinoises. À l’heure actuelle, environ 150 établissements d’enseignement supérieur en Chine proposent des cursus de la langue française, et l’Alliance française a ouvert 14 établissements d’enseignement en Chine. Le nombre d’étudiants chinois qui étudient le français a dépassé les 130 000, plus de 40 000 étudiants chinois font des études en France. La passion pour l’apprentissage de la langue chinoise en France s’accroît, avec environ 110 000 élèves français qui apprennent le chinois. Les 18 instituts Confucius et la classe Confucius instaurés conjointement par la Chine et la France, ainsi que les 62 classes internationales de chinois dans les écoles primaires et secondaires françaises, sont devenus des plates-formes importantes pour l’apprentissage du chinois par les élèves et les étudiants français. La culture chinoise pénètre aussi les familles françaises. Au cours du premier semestre de cette année, les « Festivals des lanternes » ont eu lieu dans plusieurs villes françaises, attirant des centaines de milliers de Français. Cet été, le jeu vidéo « Black Myth – Wukong », adapté du roman classique chinois la Pérégrination vers l’Occident, a attiré un grand nombre de jeunes fans en France.

Dans l’avenir, l’inspiration mutuelle des civilisations chinoise et française brillera de tous ses éclats à travers l’inclusivité et les renforcements mutuels. L’inclusivité et l’ouverture sont les points communs des cultures chinoise et française. Au début de cette année, le concert ouvrant le 60e anniversaire des relations diplomatiques sino-françaises et l’Année du tourisme culturel s’est tenu avec succès en France, où les artistes des deux pays, en associant subtilement les instruments et techniques musicaux chinois et occidentaux, ont interprété conjointement plusieurs œuvres chinoises et françaises. Le mois dernier, le spectacle de danse original « Wing Chun » a été présenté par le Théâtre d’Opéra et de Danse de Shenzhen pour la première fois à Paris. Ce spectacle a montré de manière innovante les arts martiaux et les éléments culturels traditionnels chinois sous forme de danse moderne occidentale, et a été longuement applaudi par l’audience française. Et voilà le meilleur exemple des échanges et de l’inspiration mutuelle entre cultures pour le développement commun.

Le dialogue entre les civilisations chinoise et française au-delà du temps et de l’espace nous démontre que, si une civilisation veut trouver sa place dans le concert des nations, elle ne peut pas se replier sur soi en se sous-estimant, et encore moins appliquer la politique du plus fort en se prenant pour le plus puissant. Ce n’est que par les échanges égaux et l’inspiration mutuelle entre civilisations que nous pourrons faire avancer le développement durable et le progrès de la civilisation humaine. Victor Hugo a dit : « Il y a un spectacle plus grand que la mer, c’est le ciel ; il y a un spectacle plus grand que le ciel, c’est l’intérieur de l’âme. » La Chine et la France devraient continuer à faire preuve d’ouverture d’esprit et à puiser davantage de sagesse de leurs systèmes, voies et cultures respectifs pour, j’en suis convaincu, dépasser les barrières et les divergences ponctuelles et offrir un modèle pour le développement commun des différentes civilisations dans le monde.

Mesdames, Messieurs,

Chers amis,

L’Afrique est le continent qui regroupe le plus grand nombre de pays francophones et de locuteurs français, elle est sans aucun doute une composante importante du « monde francophone ». Actuellement 60% des utilisateurs de la langue française résident en Afrique. Renforcer les relations de coopération amicale avec les pays africains constitue la priorité de la diplomatie de la Chine. En 2000, la Chine et l’Afrique ont conjointement pris l’initiative de créer le Forum sur la coopération Chine-Afrique. J’ai eu l’honneur de participer à la préparation du premier forum. Depuis 24 ans, la Chine a aidé l’Afrique à construire et moderniser environ cent ports, mille ponts, 10 000 kilomètres de chemins de fer, et 100 000 kilomètres de routes, ainsi que des centaines d’hôpitaux, d’écoles, et d’établissements culturels et sportifs. Le FOCAC (acronyme en anglais de ce forum) est devenu non seulement la plateforme principale de la coopération sino-africaine, mais aussi une vitrine d’échanges et un pont reliant la Chine et le monde francophone. En septembre dernier, le Sommet de Beijing du FOCAC s’est tenu avec succès, marquant une nouvelle étape du développement de la coopération sino-africaine, et plus encore, envoyant un message fort annonçant des efforts conjoints de la Chine et de l’Afrique pour la modernisation.

En tant que continent regroupant le plus grand nombre de pays en développement, l’Afrique modernisée sera un nouvel accomplissement historique qui remodèlera le paysage de la modernisation mondiale, et apportera d’énormes opportunités aux pays francophones et le reste du monde.

Opportunité pour le développement pacifique. La modernisation de l’Afrique contribuera à réduire la pauvreté et à améliorer l’éducation. Elle aura des impacts positifs sur l’apaisement des conflits et instabilités régionaux et la promotion de la sécurité dans le monde.

Opportunité pour l’ouverture et la coopération. La modernisation de l’Afrique implique l’industrialisation et la modernisation de l’agriculture qui permettront d’améliorer sans cesse le niveau de vie de plus d’un milliard d’Africains. Cela créera une immense demande sur le marché et des opportunités d’investissement immensurables, et insufflera une nouvelle dynamique à l’économie mondiale.

Opportunité pour l’innovation verte. La modernisation de l’Afrique pourra tirer parti des avancées mondiales en matière d’innovation technologique et de progrès numérique pour réaliser un développement prodigieux. En même temps, l’Afrique pourra faire valoir ses ressources en énergies propres telles que le solaire, l’éolien et l’hydraulique pour favoriser la transition énergétique mondiale et la réalisation des objectifs de réduction des émissions de carbone.

Opportunité pour le progrès des civilisations. La modernisation de l’Afrique fera de ce continent, riche en traditions culturelles, en ressources artistiques et en concepts de gouvernance, un pôle important d’un monde multipolaire, grâce à une diversité culturelle unique, un contributeur à la multipolarisation égale et ordonnée.

La Chine est bien consciente que, dans sa marche vers la modernisation, il faut non seulement suivre la loi générale de la modernisation, mais aussi et surtout se baser sur les conditions nationales. Durant les plus de 40 ans de réforme et d’ouverture, la Chine accumule sans cesse de nouvelles expériences de développement. Par exemple, « Pour être riche, construisez des routes », c’est ce que l’on dit souvent pour marquer l’importance des infrastructures, « traverser la rivière en tâtant les pierres », c’est pour encourager les expérimentations, « la réduction ciblée de la pauvreté », c’est une stratégie de l’élimination de la pauvreté qui met en relief le pragmatisme et l’adaptation aux conditions locales. Ces expériences peuvent offrir des pistes de réflexion pour le développement des pays africains. Bien sûr, il n’y a pas un seul modèle de la modernisation. Lorsque la Chine renforce les échanges d’expériences en matière de gouvernance avec les pays africains, elle veille à ce que la méthode chinoise ne soit pas appliquée sans distinction de réalités locales, à travers une simple démarche de « copier-coller ».

La Chine est consciente également que l’acte est toujours plus éloquent que la parole. Lors du dernier sommet du FOCAC à Beijing, la Chine s’est à nouveau engagée à fournir à l’Afrique un soutien financier de 360 milliards de yuans RMB, à accorder le traitement de tarif douanier zéro à 100% de catégories de produits importés de 33 pays africains les moins avancés, à réaliser 30 projets d’interconnexion d’infrastructures et 1 000 projets de bien-être social Petits et Beaux en Afrique, et à créer au moins un million d’emplois sur place. Avec ces actions concrètes, la Chine aide l’Afrique à accélérer sa marche vers la réalisation de la vision de l’Agenda 2063 de l’Union africaine.

Certains médias occidentaux voient en la générosité de la Chine envers l’Afrique, une tentative de dépecer la sphère d’influence de l’Occident. Cette interprétation ne tient pas debout. La Chine et l’Afrique ont connu un passé similaire et partagent un désir commun de développement. Comme le disent souvent les Chinois : « Mouillé auparavant par la pluie, on souhaite tenir un parapluie pour autrui. » L’Afrique est une terre pleine de vitalité et ne devrait pas être une arène des grandes puissances. Fidèle à l’esprit de sincérité, de résultats effectifs, d’amitié et de bonne foi, et à la conception correcte de la justice et des intérêts, la Chine mène sa coopération avec l’Afrique et encourage la communauté internationale à accorder plus d’attention au continent et à y investir davantage. Nous soutenons toutes les actions qui favorisent le développement économique et l’amélioration des conditions de vie des pays africains.

J’ai aussi le grand plaisir de voir que la Chine et la France ont toujours fait valoir le caractère pionnier de leurs relations dans la coopération avec l’Afrique. Depuis que les deux gouvernements ont publié une déclaration conjointe sur la coopération en marchés tiers en 2015, la Chine et la France ont signé quatre listes de projets de démonstration de coopération en matière de marchés tiers. Plusieurs projets ont déjà été concrétisés dans des pays africains francophones, tels que la route nationale n°1 en République du Congo, le terminal à conteneurs du port en eau profonde de Kribi au Cameroun, la station d’épuration de Hanna Bay au Sénégal, le parc pharmaceutique du groupe FOSUN Pharma en Côte d’Ivoire, etc. Ces dernières années, la coopération tripartite Chine-France-Afrique est passée du modèle favorisé par les gouvernements au modèle dirigé par les entreprises, ce qui est plus propice à la valorisation des atouts respectifs des parties concernées, plus conforme à la loi du marché et aux besoins de l’Afrique, et plus en phase avec la tendance historique de la mondialisation économique inclusive et bénéfique pour tous. Nous espérons que davantage d’entreprises chinoises et françaises pourront renforcer leur présence en Afrique, afin d’agrandir sans cesse le gâteau de la coopération et d’accumuler de plus en plus d’opportunités de gagnant-gagnant.

Mesdames et Messieurs,

Chers amis,

Je viens de présenter le développement de la langue française en Chine, les progrès encourageants des relations sino-françaises depuis 60 ans, et les fruits de la coopération entre la Chine et les pays francophones d’Afrique. J’espère que cela vous permettra de mieux comprendre la Chine, sa politique étrangère, ainsi que ses relations avec le monde francophone. La Chine est prête à renforcer la communication, les échanges et la coopération avec les pays francophones, afin de construire ensemble une communauté d’avenir partagé pour l’humanité.

Je vous en remercie.

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